Retour aux cauchemars
27 octobre 20258 min

Houilles : J'ai failli transformer mon locataire en Claude François (pour 8 000 €)

RénovationHouillesÉlectricitéMise à la terreInvestissement LocatifSécuritéRéveil-Matin
Houilles : J'ai failli transformer mon locataire en Claude François (pour 8 000 €)

L'histoire de Mathieu, primo-accédant à Houilles, dont la rénovation de studio a viré au cauchemar électrique. Apprenez l'importance vitale de la mise à la terre.

On dit souvent que l’optimisme est une forme de maladie mentale chez les primo-accédants. Si c’est vrai, à 29 ans, j’étais en phase terminale. J'avais les yeux qui brillaient plus que le carrelage métro que je venais de poser dans mon 19 m² à Houilles.

« Ça va être un bijou, Mathieu. Un vrai petit cocon pour cadre dynamique en transit sur le RER A », me disais-je en admirant ma nouvelle plaque à induction dernier cri. Ce que je ne savais pas, c'est que mon « cocon » était en train de se transformer en une chaise électrique géante, le tout dans le calme trompeur du quartier Réveil-Matin.

À l'époque, j'avais le profil type du pigeon idéal : j'avais lu trois articles sur l'indépendance financière, regardé deux vidéos YouTube sur le 'home staging » et j'avais une confiance aveugle en mon pote d'enfance qui « touche sa bille en travaux ». Erreur fatale. Pour économiser quelques billets et maximiser mon rendement locatif, j'avais décidé de piloter moi-même la rénovation totale du studio. Mon projet ? Transformer une verrue des années 60 en un loft miniature high-tech. Sauf que dans l'ancien, le high-tech sans fondations techniques, c'est un peu comme mettre un moteur de Ferrari dans une carcasse de deudeuche pourrie.

La danse de Saint-Guy au-dessus de l'évier

Tout a commencé un mardi après-midi pluvieux. J'étais fier comme un bar-tabac, en train de tester mon nouveau mitigeur brossé. Au même moment, dans le pavillon mitoyen, mon voisin de palier avait décidé de lancer une rénovation lourde de sa salle de bain. J'entendais le vrombissement sourd d'une rainureuse contre le mur.

C’est là que le surnaturel s'est invité à Houilles.

En voulant couper l'eau, ma main a effleuré le bord de mon évier en inox. J'ai ressenti une décharge. Pas un petit picotement de rien du tout, non. Une vraie châtaigne électrique, le genre qui vous fait lâcher un juron créatif et remonter les poils des avant-bras jusqu'aux oreilles. J'ai cru à un coup de fatigue. Je recommence. BZZZT. Rebelote.

À chaque fois que la machine du voisin s'activait de l'autre côté du mur, mon évier devenait un conducteur de jus. Je n'étais plus un investisseur immobilier, j'étais devenu l'assistant de Nikola Tesla, mais sans le génie et avec beaucoup plus de sueurs froides. Mon studio, mon « placement sûr », venait de décider qu'il voulait ma peau (ou celle de mon futur locataire, ce qui, juridiquement parlant, était presque pire).

Le mystère du fil jaune et vert qui ne menait nulle part

J'ai appelé en urgence un électricien, un vrai cette fois. Pas un pote, pas un bricoleur du dimanche, mais un type avec un multimètre et un regard qui en dit long sur la bêtise humaine. Il a ouvert mon tableau électrique tout neuf, celui que j'étais si fier d'avoir « modernisé » avec des disjoncteurs rutilants.

— « Dites-moi, Mathieu... vous l'avez branché où, le collecteur de terre ? » me demande-t-il avec un calme olympien. — « Ben, sur le bornier vert, là où il y a tous les fils jaunes et verts. C'est propre, non ? »

Il a souri. Ce genre de sourire triste qu'un médecin réserve à un patient qui avoue fumer trois paquets par jour. Il a tiré sur le câble principal de terre qui sortait de mon tableau. Le fil est venu tout seul, comme un spaghetti trop cuit. Il n'était relié à RIEN.

Voici le cours technique gratuit (celui que j'aurais dû payer 10 000 € de moins si je l'avais su avant) : dans une installation électrique aux normes, la « mise à la terre » est le système qui permet d'évacuer les courants de fuite vers le sol via un « piquet de terre » ou une boucle en fond de fouille. Sans cela, si un appareil a un défaut d'isolement (ou si le voisin a une installation foireuse qui « bave » sur les structures métalliques communes), le courant cherche le chemin le plus court pour retourner à la terre.

Ce chemin, c'était moi. Ou mon évier. Ou mon futur locataire sous sa douche.

Le pire ? En installant des appareils de « Classe I » (ceux qui nécessitent impérativement une terre, comme mon four et ma plaque), j'avais créé un réseau d'interconnexion de toutes les masses métalliques de l'appart. Comme rien n'était relié à la terre de l'immeuble, le moindre défaut électrique quelque part dans le bâtiment chargeait tout mon appartement comme une batterie géante. C'est ce qu'on appelle l'absence de « liaison équipotentielle ». Un mot savant pour dire : « Tu vas mourir en faisant la vaisselle ».

Le prix du silence (et de la survie)

La sentence est tombée plus vite qu'un RER A un jour de grève.

Pour sécuriser ce studio à Houilles, il ne suffisait pas de changer trois prises. Il fallait créer une colonne de terre depuis la cave du vieil immeuble, percer des dalles de béton de 40 cm d'épaisseur, et surtout, refaire tout le câblage que mon « pote » avait malencontreusement passé sans vérifier la continuité de la terre.

Le devis ? 8 400 € TTC.

J'ai essayé de négocier. J'ai essayé de dire que c'était la faute du voisin. L'électricien m'a simplement répondu : « Monsieur, si vous louez ça en l'état et qu'un gamin touche le frigo pieds nus, vous ne finirez pas l'année dans votre salon, mais aux Baumettes. »

L'effet domino a été total. J'ai dû casser une partie de ma superbe crédence toute neuve pour repasser les câbles. J'ai dû parlementer avec le syndic de copropriété pour obtenir l'autorisation de percer les parties communes en urgence. Mon budget « déco premium » a été intégralement englouti dans du cuivre et des gaines ICTA enterrées. Adieu le canapé de designer, bonjour le modèle de base chez l'enseigne suédoise.

Épilogue : L'humilité électrique

Six mois plus tard, le studio est enfin loué. J'ai un certificat de conformité (Consuel) encadré dans mon bureau, juste pour me rappeler le prix de ma stupidité.

Quand je repense à mon arrogance de débutant, j'en ai encore les mains qui tremblent. J'ai voulu jouer au promoteur sans comprendre que l'immobilier, ce n'est pas choisir des rideaux, c'est s'assurer que les murs ne sont pas des pièges mortels. J'ai appris que la rénovation ne s'improvise pas, surtout dans l'ancien francilien où chaque mur cache une surprise datant de l'après-guerre.

Aujourd'hui, quand je passe rue de l'Église à Houilles, je ne regarde plus les façades. Je regarde si je vois des tresses de terre qui descendent le long des gouttières. On ne m'y reprendra plus.

La Leçon :

  1. La terre n'est pas une option : Un fil jaune et vert ne signifie pas que vous êtes protégé. Testez systématiquement la « résistance de terre » avec un appareil de mesure spécifique (telluromètre).
  2. L'illusion du neuf : Un tableau électrique moderne avec des disjoncteurs différentiels 30mA est inutile si la boucle de terre est inexistante ou sectionnée. Le différentiel ne « sautera » pas si le courant n'a pas de chemin pour s'échapper.
  3. Liaison Équipotentielle : Dans une pièce d'eau, toutes les parties métalliques (tuyaux, huisseries, baignoire) doivent être reliées entre elles et à la terre. C'est votre seule assurance-vie contre les courants vagabonds.
  4. Le coût de l'amateurisme : Économiser 2 000 € sur un artisan non qualifié peut vous en coûter 10 000 € en réparations d'urgence et en mise en conformité a posteriori.

Évitez le coup de jus : faites-vous accompagner pour vos travaux

Ça vous fait peur ?

Ne laissez pas votre chantier devenir une histoire sur ce site.

Sécuriser mon projet

Vous avez vécu pire ?

Racontez-nous votre enfer →