Retour aux cauchemars
15 septembre 20258 min

Cauchemar à Neuilly : Quand ma baignoire a voulu visiter mes voisins des Sablons

RénovationNeuilly-sur-SeinePlomberieStructureChambre de bonneSablonsSinistre
Cauchemar à Neuilly : Quand ma baignoire a voulu visiter mes voisins des Sablons

Récit d'un désastre de rénovation à Neuilly-sur-Seine : l'effondrement d'une baignoire dans une chambre de bonne. Conseils techniques et erreurs à éviter.

Est-ce qu’il est physiquement possible de mourir de honte avant d’accoucher, ou est-ce que le corps humain prévoit une sorte de sécurité biologique pour éviter que le futur bébé ne naisse dans un commissariat ? Je pose la question pour une amie. Enfin, pour moi.

Parce que se retrouver à poil, enceinte de huit mois et demi, assise dans une baignoire sabot qui vient de s'enfoncer de dix centimètres dans le plancher d'un immeuble haussmannien de Neuilly-sur-Seine, ce n'est pas exactement le « projet de vie » que j'avais vendu à mon banquier.

Le mirage du chic à petit prix

Rembobinons. Je suis artiste-peintre. Dans le jargon immobilier, ça veut dire « fauchée avec des goûts de luxe ». Quand j’ai déniché cette chambre de bonne de 11m² sous les toits, rue de l'Église, en plein cœur du quartier des Sablons, j’ai cru avoir braqué le destin. C’était petit, certes, mais c’était Neuilly ! L'adresse qui fait dire aux gens : 'Ah oui, quand même ».

J'avais ce rêve un peu crétin d'atelier d'artiste sous les mansardes, avec la lumière du Nord et le parquet qui craque. Je l'ai achetée avec mes dernières économies et un prêt sur trente ans qui me coûte un rein chaque mois. À l’époque, je me prenais pour une visionnaire de la déco. 'Oh, le plancher est un peu souple ? C'est le charme de l'ancien ! » disais-je avec l'arrogance d'une gamine qui n'a jamais tenu autre chose qu'un pinceau. J'ai installé une baignoire sabot en fonte récupérée aux puces – parce que c'est « tellement plus romantique » qu'une douche – sur un sol qui n'avait probablement pas été inspecté depuis l'armistice de 1918.

Le grand saut (sans parachute et sans culotte)

Tout a basculé un mardi soir. À trois semaines du terme, mon centre de gravité est à peu près aussi stable que la politique fiscale française. J’avais besoin de détendre mon dos de baleine échouée. J’ai fait couler un bain bien chaud.

Le truc avec la physique, c’est qu’elle s’en fout de vos aspirations artistiques. L'eau pèse 1kg par litre. Ma baignoire en fonte ? 80kg. Moi ? Une bonne soixante-dizaine à ce stade. Ajoutez à ça le poids de la culpabilité et vous obtenez une pression au centimètre carré que mon pauvre plancher n'avait jamais signée au contrat.

Soudain, un bruit. Pas un petit craquement de parquet romantique. Non, un bruit de fracture ouverte. Un « CRAC » viscéral, suivi d'un lent et inexorable affaissement. Le côté gauche de la baignoire a décidé de prendre l'ascenseur pour le 5ème étage. J'ai vu le carrelage se fissurer en slow-motion, comme dans un film de catastrophe à petit budget. L'eau a commencé à déborder, non pas par le haut, mais par la pente que venait de créer le sol en train de rendre l'âme.

L'anatomie d'un désastre : pourquoi mon sol a rendu l'âme

C’est là que j’ai appris, à mes dépens, ce qu'est une « solive » et pourquoi on ne rigole pas avec. Dans ces vieux immeubles de Neuilly, sous le joli parquet en chêne, il y a des poutres en bois (les fameuses solives) qui soutiennent tout.

Le problème technique était triple, et si j'avais écouté un pro au lieu de lire des blogs de déco Pinterest, j'aurais su que :

  1. La pourriture cubique (ou mérule) : Une micro-fuite sur l'ancienne évacuation avait lentement grignoté le bois pendant des années. Les solives étaient devenues ce qu'on appelle du « bois mort » : visuellement ça ressemble à du bois, mais structurellement ça a la résistance d'un biscuit Lu trempé dans le café.
  2. Le poinçonnement : Ma baignoire sabot reposait sur quatre pieds griffes très fins. Au lieu de répartir la charge, tout le poids (environ 250kg avec l'eau et ma carcasse) était concentré sur quatre points minuscules. C'est l'effet « talon aiguille » sur du sable.
  3. L'absence d'étanchéité sous carrelage (SEL) : En posant mon carrelage directement sur un vieux support, sans « Système d'Étanchéité Liquide », j'ai permis à chaque petite éclaboussure de s'infiltrer directement dans les lambourdes.

Résultat : la structure portante était devenue une éponge géante. Et une éponge, ça ne porte pas une baignoire en fonte et une femme enceinte.

La chasse au plombier dans le 92 (mission impossible)

Panique totale. J'ai réussi à m'extraire de la baignoire avant qu'elle ne finisse chez le Colonel à la retraite du dessous. Mais l'eau, elle, n'a pas attendu. Le plafond du 5ème étage a commencé à ressembler à une carte de France humide.

Appeler un artisan en urgence à Neuilly quand on a une tête de SDF et qu'on vit dans 11m², c'est une expérience sociologique. Le premier plombier-maçon est venu, a regardé le trou dans mon sol, a vu mon ventre, et m'a sorti un devis à 8 500 € avec un sourire qui disait : « Je sais que tu es désespérée, je vais t'essorer ».

Il fallait :

  • Déposer toute la salle d'eau (enfin, le coin de 2m²).
  • Étayer le plafond du voisin du dessous (grand moment de solitude diplomatique).
  • Remplacer les solives pourries par des renforts en acier ou des « moises » (des morceaux de bois neufs boulonnés aux anciens).
  • Refaire une dalle allégée et une étanchéité digne de ce nom.

J'ai passé trois jours au téléphone, en pleurs, à essayer de trouver quelqu'un qui ne me prendrait pas pour un compte épargne sur pattes. La tension était à son comble : j'avais des contractions de Braxton Hicks à chaque fois que j'entendais le mot « structurel ».

Épilogue : La fin du naufrage

Finalement, j'ai trouvé un petit entrepreneur qui n'avait pas peur des projets de micro-surface. On a dû abandonner la fonte pour un bac à douche ultra-léger et renforcer le sol avec une structure métallique. Coût de l'opération : 4 200 €, une fortune pour moi, mais le prix de la sécurité pour que mon fils ne naisse pas dans une chute libre.

J'ai emménagé dans ma chambre de bonne « sécurisée » juste à temps pour perdre les eaux... sur un sol qui, cette fois, n'a pas bougé d'un millimètre.

L'humilité, c'est ce qui reste quand votre rêve de bohème s'effondre littéralement sous vos fesses. Aujourd'hui, quand je vois un appart 'avec du charme » à Neuilly, je ne regarde plus les moulures. Je regarde la flèche du plancher et je demande le diagnostic technique de la structure. On ne m'y reprendra plus.

La Leçon :

  1. Poids mort vs Poids vif : Dans l'ancien, surtout en chambre de bonne, vérifiez toujours la capacité de charge au m² avant d'installer des éléments lourds (baignoire fonte, bibliothèque massive).
  2. L'étanchéité est non-négociable : Un carrelage n'est jamais étanche. Sans une natte ou un produit d'étanchéité (SEL) en dessous, vous tuez vos solives à petit feu.
  3. Le diagnostic structurel : Si le sol « rebondit » quand vous sautez, c'est que les solives sont soit sous-dimensionnées, soit attaquées. Un expert doit valider avant tout travaux de plomberie.
  4. Répartir la charge : Si vous tenez absolument à votre baignoire rétro, installez une plaque de répartition de charge sous les pieds pour éviter l'effet de poinçonnement.

Évitez le naufrage : confiez votre rénovation à des experts

Ça vous fait peur ?

Ne laissez pas votre chantier devenir une histoire sur ce site.

Sécuriser mon projet

Vous avez vécu pire ?

Racontez-nous votre enfer →